Les cadeaux budgétaires de l’UE arrivent à point nommé pour les fêtes

L’UE entend renforcer sa lutte contre la problématique de l’endettement en instaurant de nouvelles règles. On peut toutefois douter de leur efficacité, notamment en raison des compromis et des concessions qui ont été faits.

Noël approche. Et pendant que certains recherchent encore fébrilement leurs derniers cadeaux, d’autres profitent déjà de généreuses faveurs. Au sein de l’UE, par exemple, où les ministres des finances se sont mis d’accord mercredi après-midi sur de nouvelles règles d’endettement. Cette refonte du pacte de stabilité et de croissance vise à garantir le respect, par les États membres, des critères de Maastricht, qui prévoient une dette publique maximale de 60% du PIB national et limitent le déficit annuel à 3%.

Maastricht, c’était quand même quelque chose…

Mais Maastricht, c’est toute une histoire. En effet, un simple coup d’œil sur les chiffres budgétaires montre qu’un véritable laisser-aller s’est installé depuis longtemps, tant dans l’UE que dans la zone euro, et que les objectifs de stabilité semblent n’être tout au plus que des recommandations pour de nombreux gouvernements nationaux (voir également le Point de vue du 24 novembre 2023). La séduisante allégation selon laquelle «Maastricht ne compte pas» est peut-être un peu exagérée, mais au vu de l’endettement moyen des États membres de l’UE, qui est d’environ 83%, il y a bien plus qu’un zeste de vérité.

Même si la procédure de surveillance et de déficit possible en cas d’infraction aux règles est restée une vaine menace, suspendre les règles de Maastricht depuis la pandémie de coronavirus fut une erreur au vu de la politique d’endettement laxiste des ministères des finances de nombreux pays de l’UE. Mais cela devrait prendre fin à partir du nouvel exercice budgétaire, avec les règles du pacte de stabilité et de croissance qui viennent d’être renégociées pour mettre un terme à une politique d’endettement débridée. On pourrait penser que les ministres des finances se sont mis d’accord sur des règles offensives. Mais c’est loin d’être le cas: au lieu de dispositions strictes, il flotte dans le cadre réglementaire une idée d’exception possible, et ce sont surtout les compromis ou, pour s’en tenir à la terminologie de Noël, les cadeaux offerts, qui sautent aux yeux.

La règle est suivie de l’exception

Le fait de prévoir, pour les pays fortement endettés, une marge de sécurité de 1,5 point de pourcentage par rapport au plafond de déficit correspond certes à un resserrement considérable. Cela limiterait dans les faits le nouvel endettement annuel autorisé de 3,0 à 1,5% du PIB. Mais ces durcissements s’accompagnent d’un certain nombre d’exceptions qui, en raison de leur formulation évasive, ne laissent guère espérer d’amélioration notable sur le plan de la rigueur budgétaire.

Ainsi, jusqu’en 2027, le versement des intérêts sur les fonds provenant du plan de relance post-pandémie ne sera pas comptabilisé dans le nouveau déficit annuel des pays fortement endettés. De même, et cela tourne à la religion fiscale, les États lourdement endettés se verront accorder trois ans de plus pour présenter un plan de réduction durable de leur dette, s’ils utilisent le temps qui leur est imparti pour entreprendre des réformes structurelles et des investissements importants (ce que cela veut dire reste nébuleux). Cela veut dire que les pays fortement endettés devront se mettre d’accord avec la Commission européenne sur un plan de 7 ans à l’issue duquel la dette devra s’inscrire sur une trajectoire de «recul durable», une formulation vague au possible. Pour les pays dont la dette publique est plus faible, le cadre de planification est de quatre ans.

Le loup dans la bergerie

Exceptions, formulations évasives et compromis: on peut douter de l’effet des nouvelles règles sur les États endettés problématiques. Le ministre allemand des finances Christian Lindner a certes imposé une «clause de sauvegarde» qui exige un désendettement annuel d’au moins 0,5 point de pourcentage pour tout pays endetté à plus de 60% de son PIB (et même de 1,0 point de pourcentage au moins pour les pays dont la dette publique est supérieure à 90%). On peut cependant – ou à plus forte raison – se demander pourquoi il faudrait respecter les exigences futures plus strictes alors que les règles passées, moins strictes, ont déjà été ignorées avec une notable nonchalance. D’autant plus que le régime de sanctions continue de souffrir du fait que beaucoup de ceux qui doivent statuer sur les violations des règles ne sont pas eux-mêmes très attentifs aux limites de leur dette et de leur déficit. Dans ce contexte, l’image du «loup dans la bergerie» ne semble pas tout à fait usurpée.

En raison de cette seule considération essentielle, nous n’attendons pas, avec le nouveau pacte de stabilité et économique, d’amélioration durable de l’endettement en Europe. À cela s’ajoutent des projets, des bouleversements et des défis qui, pendant des décennies, coûteront des milliards d’euros et qui n’ont même pas encore été pris en compte dans les budgets actuels: l’évolution démographique, les dépenses pour la sécurité militaire et énergétique, ou encore le coût de la transition écologique de l’économie, absorberont littéralement des sommes gigantesques. De ce point de vue, peu importe qu’on ait offert de petits ou gros cadeaux lors de la renégociation des règles d’endettement. On ignore de toutes façons comment ils seront financés.

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