À l’avenir, la propriété du logement doit faire l’objet d’une imposition différente. La Commission de l’économie et des redevances du Conseil des États a proposé de premiers paramètres pour ce changement de système. Quelles sont les conséquences pour les propriétaires immobiliers?
Le 21 août, la Commission de l’économie et des redevances du Conseil des États (CER-E) a présenté les paramètres du changement de système en matière d’imposition de la propriété du logement. Pour les propriétaires immobiliers, le principe suivant devrait s’appliquer: s’il s’agit du domicile principal, il n’y aura plus de revenu locatif fictif, c’est-à-dire qu’aucune valeur locative ne sera plus ajoutée au revenu imposable. En retour, les déductions fiscales pour les frais d’entretien et d’intérêts seront largement supprimées.
De nombreux propriétaires immobiliers devraient profiter de ce changement de système, car la valeur locative à déclarer est souvent supérieure aux déductions fiscales par ailleurs occasionnées. Toutefois, il convient de différencier les différents groupes.
Acquéreurs d’une propriété pour la première fois: une tendance à la hausse des prix ne peut pas être exclue
S’agissant des personnes qui acquièrent un logement pour la première fois, la CER-E veut permettre une déduction fiscale considérable pour les intérêts de la dette – conformément au mandat constitutionnel de l’encouragement à l’accession à la propriété. Concrètement, la question de la limite de cette déduction en termes de montant ou dans le temps est encore ouverte.
Il est possible que les mesures proposées entraînent une nouvelle hausse des prix de l’immobilier. En effet, le maintien, en parallèle, de la déduction des intérêts et de la suppression de la valeur locative rend l’achat immobilier, pour les acquéreurs d’un premier logement, encore plus intéressant – et pourrait tirer vers le haut les prix de la propriété du logement.
Propriétaires immobiliers actuels: pas d’intervention dans l’immédiat
Les effets fiscaux jouent également un rôle pour les propriétaires immobiliers existants. Mais pour eux, aucune intervention n’est nécessaire à l’heure actuelle. En effet, tant que le niveau des taux d’intérêt reste aussi bas, les déductions fiscales pour les intérêts débiteurs sont plutôt insignifiantes. De même, une réduction du prêt hypothécaire ne s’impose pas à court terme. Deux raisons parlent en défaveur d’un amortissement du prêt hypothécaire à long terme:
- soit aucun patrimoine n’est disponible pour l’amortissement,
- soit le patrimoine est investi avec un rendement supérieur aux intérêts hypothécaires. En d’autres termes: en cas de remboursement d’un prêt hypothécaire, les économies d’intérêts ainsi réalisées seraient moins élevées que la perte de revenus de la fortune.
Le deuxième scénario est d’ailleurs encore plus intéressant du fait d’une proposition de la CER-E. En effet, la CER-E envisage de continuer à accorder aux propriétaires immobiliers existants un taux d’intérêt limité par rapport aux revenus de la fortune. Le plafond pourrait être de 80% ou 100% des revenus de la fortune. Cela profiterait aux propriétaires de logement fortunés qui, par exemple, tirent des revenus substantiels des titres ou des revenus locatifs.
Les propriétaires d’objets d’habitation largement payés en seraient les gagnants
Les propriétaires disposant d’objets d’habitation largement payés bénéficieront tout particulièrement du changement de système. Parmi elles, on trouve par exemple des personnes à un âge avancé, qui ont largement payé leur prêt hypothécaire au fil des ans et qui, par conséquent, ne peuvent plus déduire d’intérêts débiteurs, mais qui doivent déclarer des valeurs locatives élevées. Les biens immobiliers des personnes à âge avancé sont souvent des objets plus anciens. Si ceux-ci ont un besoin d’une véritable rénovation, le changement de système pourrait avoir un effet un effet boomerang, comme expliqué ci-après…
Les propriétaires dont les immeubles nécessitent des travaux de rénovation sont les perdants
Le changement de système prévu est préjudiciable à tous les propriétaires immobiliers dont le bien présente des besoins de rénovation élevés. En effet, les frais d’entretien ne devraient plus être déductibles à l’avenir. Cela devrait également s’appliquer aux investissements visant à économiser de l’énergie ainsi qu’aux frais occasionnés par les travaux de restauration de monuments historiques, du moins au niveau de l’impôt fédéral. En revanche, les impôts cantonaux devraient continuer à bénéficier de déductions. Les changements imminents suggèrent que les travaux de rénovation et de conversion devant s’étendre sur plusieurs années devraient être avancés afin de bénéficier, autant que possible, de toute les possibilités de déductions actuelles.
Propriétaires de résidences secondaires: pas de modification du statu quo
Par contre, aucun changement n’est prévu pour les propriétaires de résidences secondaires: le changement de système ne concerne que le domicile principal, selon la volonté de la CER-E. En d’autres termes, pour les maisons de vacances et autres résidences secondaires, la valeur locative doit toujours être soumise à imposition. À l’inverse, les déductions fiscales pour frais d’intérêts et d’entretien peuvent continuer à être appliquées, comme jusqu’à présent.
Et ensuite…?
Les grandes lignes du changement de système seront débattues au cours des prochaines discussions parlementaires et, des modifications de fond sont encore à prévoir. Un modèle élaboré pourrait être mis en consultation à la fin du premier trimestre 2019. Le changement de système bénéficie d’un large soutien politique. Si aucun groupe politique ne s’oppose au consensus et lance un référendum, le changement de système pourrait entrer en vigueur au plus tôt en 2020/21.