L’euro dans le pétrin

La zone euro est sous pression sur différents fronts. Et la faiblesse persistante de l’euro est partie pour durer. C’est pourquoi le franc restera extrêmement fort face à la monnaie unique.

Souvenez-vous: le 15 janvier 2015, la Banque nationale suisse (BNS) abolissait le cours plancher entre l’euro et le franc, provoquant une grande surprise et un tollé parmi les secteurs exportateurs suisses. En effet, la parité EUR/CHF s’est brusquement effondrée: de 1.20, le cours est subitement passé à 0.97.

Mais aujourd’hui, plus de sept ans plus tard, le cours EUR/CHF se situe à un niveau qui relaie presque la chute des cours d’alors au rang d’accident de parcours. Depuis le 5 juillet, l’euro évolue nettement au-dessous de la parité, frôlant même le plus bas de 0,95 pendant quelque temps.

Ce n’est pas pour déplaire aux Suisses qui sont en vacances, qui font leurs courses ou vont au restaurant de l’autre côté de la frontière, mais donne de plus en plus des maux de tête à la Banque centrale européenne (BCE). En effet, la monnaie unique est non seulement bien en retard par rapport au franc, mais elle a aussi perdu beaucoup de terrain par rapport à d’autres monnaies (voir graphique). Par rapport à 2015, la vigueur persistante du franc n’est donc pas le résultat d’une politique radicale de la BNS, mais plutôt le reflet d’une véritable faiblesse de l’euro, qui devient de plus en plus problématique pour la BCE qui lutte contre l’inflation galopante.

La faiblesse de l’euro aggrave le problème de l’inflation

La faiblesse de la monnaie unique confère certes aux produits d’exportation européens un certain attrait en termes de coûts sur le marché mondial, ce dont profitent les grands pays exportateurs de la zone euro. Mais cette faiblesse renchérit les importations, ce qui attise encore l’inflation au sein de l’Union monétaire. Si l’on observe l’Euro Index pondéré des échanges – à savoir le taux de change pondéré des monnaies des principaux partenaires commerciaux – à titre indicatif, les importations vers la zone euro ont renchéri d’environ 6% au cours des douze derniers mois, juste à cause de l’évolution monétaire.

Les désagréments causés par les taux de change ne devraient pas disparaître de sitôt. En effet, le recul de l’euro ne s’explique pas seulement par l’écart de taux qui s’est considérablement creusé notamment par rapport aux États-Unis et devrait continuer de s’élargir: alors que la Réserve fédérale américaine (Fed) continue de lutter énergiquement contre l’inflation en augmentant ses taux, la BCE ne devrait suivre qu’une trajectoire de normalisation hésitante. Le trilemme entre lutte contre l’inflation, absence de frein au moteur conjoncturel et prévention d’importantes forces de déchirement pour l’Union monétaire dans son ensemble restreint de plus en plus la marge de manœuvre de la BCE en matière de politique monétaire.

Craintes conjoncturelles et difficultés politiques pèsent sur l’euro

Les craintes conjoncturelles ainsi que les différences structurelles et politiques entre le nord et le sud de la zone euro, en particulier l’Italie, pèsent lourdement sur la monnaie unique. En effet, le niveau élevé des prix, l’éventualité d’une spirale salaires-prix ainsi que l’incertitude quant à un approvisionnement suffisant en énergie assombrissent de plus en plus les perspectives conjoncturelles. De même, la situation politique de l’Italie – la troisième économie de la zone euro – secoue à nouveau violemment les fondements de l’Union monétaire. L’éventualité plus que probable d’un gouvernement national de droite (élections le 25 septembre) qui ne s’attaquerait pas aux réformes urgentes d’un pays fortement endetté et dont la croissance est chroniquement faible fait déjà planer son ombre sur les marchés financiers: la prime de risque sur les obligations d’État italiennes à dix ans a augmenté d’environ 150 points de base depuis la fin du premier trimestre. Et ce, bien que la BCE ait à nouveau soutenu activement le trésor italien par des achats flexibles d’obligations et qu’elle ait lancé, via son «TPI», un programme d’achat d’obligations presque sur mesure pour l’Italie.

Pour différentes raisons, le ver est donc dans le fruit de la zone euro. Celui-ci ne disparaîtra pas de sitôt et l’euro reste sous pression. Pour la Suisse, cela signifie trois choses: premièrement, la barrière monétaire, qui limite l’importation de l’inflation depuis la zone euro, est maintenue. Deuxièmement, les biens d’importation payés en euros restent relativement bon marché. Et troisièmement, les secteurs exportateurs suisses doivent toujours composer avec la vigueur du franc. Cet effet défavorable est toutefois considérablement limité par le renchérissement élevé sur les marchés européens. C’est notamment pour cette raison que les secteurs dépendant de l’exportation se plaignent beaucoup moins qu’en 2015. Et pour rester dans la métaphore, on peut dire que le ver est bel est bien dans notre principal partenaire commercial. L’économie suisse a toutefois réussi jusqu’à présent à le contourner.

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