Les signes avant-coureurs d’une deuxième présidence Trump sont déjà là

Donald Trump affiche une attitude plus modérée et apaisée depuis sa tentative d’assassinat. Mais il a beau adopter un ton plus conciliant, il n’a pas renoncé aux points essentiels de son programme – qui influent déjà sur la vie politique et les bourses.

Se serait-il assagi? Beaucoup se posent cette question à propos de Donald Trump depuis que le républicain a échappé de justesse à une attaque meurtrière samedi dernier. Le candidat à la présidence semble, du moins pour l’instant, modérer sa rhétorique agressive et souvent acerbe. Depuis l’attaque dont il a été la cible, Trump s’est montré étonnamment conciliant, voire apaisé dans ses discours. Il exhorte désormais le pays à surmonter sa profonde division sur les plans politique et sociétal et à montrer un front uni. Autre fait notable: son vice-président désigné, J.D. Vance – généralement un pit-bull politique qui ne cache pas son goût pour les invectives – a fait preuve d’une modération inhabituelle lors de son discours à la convention républicaine de Milwaukee.

La campagne électorale s’annonce-t-elle réellement plus calme et moins haineuse qu’auparavant ou faut-il seulement y voir un interlude tactique du renard politique et de l’as du marketing (voire de l’automarketing) qu’est Trump? Son discours de clôture, très attendu à Milwaukee, n’a pas permis d’éclaircir définitivement le sujet jeudi. Il a certes pesté contre les immigrants du sud avec son mordant habituel, mais a aussi appelé le pays à dépasser ses différends ainsi que la division qui règne au sein de la société américaine. Trump a en outre renoncé à ses piques personnelles contre Biden.

Un président Trump 2.0? Après la géopolitique…

Il est clair cependant que même si le vieux loup montre moins les crocs verbalement, l’ancien président reste fidèle à son programme et ne devrait pas changer de cap, même avec un second mandat. C’est particulièrement vrai pour les relations extérieures des États-Unis, dont l’évolution ultérieure, notamment en Europe, suscite déjà l’inquiétude. Car dans le scénario d’une politique étrangère américaine à la Trump, l’insuffisance des capacités de défense européennes apparaîtrait (une fois encore) sous une lumière crue, et exigerait des milliards et des milliards de dépenses militaires, malgré la faiblesse chronique des finances publiques.

Mais la crainte que les États-Unis se lassent davantage de jouer les gendarmes du monde sous-payés sous la présidence Trump n’habite pas seulement les Européens. Taïwan, dont l’intégrité territoriale est menacée de manière plus ou moins latente par la Chine, s’inquiète également de l’éventuel retour de Trump à la Maison-Blanche. En effet, le candidat à la présidence ne compte pas honorer l’engagement des États-Unis à fournir un appui en cas d’agression militaire chinoise. Ou plutôt: fidèle à sa logique commerciale bien connue, il conditionne une intervention: «Je pense que Taïwan devrait nous payer pour sa défense.»

…les bourses

Donald Trump trace donc déjà les grandes lignes de ce qui pourrait être sa politique étrangère si le monde était confronté à un foyer de tensions. Le spectre d’un second mandat ne se dresse pas seulement sur la géopolitique, mais aussi sur les bourses. Car Taïwan n’est pas seulement un État insulaire parmi d’autres: c’est le fournisseur de puces du monde. Presque toutes les puces informatiques avancées proviennent de cette île située au large des côtes chinoises. La Taïwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC) est de loin le plus grand fabricant indépendant de semi-conducteurs au monde. Si la production était interrompue en raison d’une escalade militaire, ce serait une véritable catastrophe pour de nombreux secteurs. Des ordinateurs aux machines à laver en passant par la construction automobile, sans les puces taïwanaises, beaucoup de productions s’arrêteraient très rapidement. En plus, l’intelligence artificielle (IA) actuellement en plein essor risquerait de s’effondrer brutalement.

Cette préoccupation explique notamment pourquoi ceux qui faisaient auparavant figure de favoris en bourse cette année essuient désormais des vents contraires inhabituels: ASML, AMD ou le premier de cordée, Nvidia, subissent de fortes pressions et voient leurs cours dégringoler (voir graphique). Mais à nos yeux, la crainte d’une politique étrangère Trump ne suffit pas à expliquer ces corrections. Elles sont plutôt liées au contexte actuel, où les rêves et les espoirs suscités par l’IA ont quelque peu occulté une conjoncture devenue plus difficile.

Les sanctions douanières empoisonnent le secteur des semi-conducteurs

En fait, les cours du secteur des semi-conducteurs subissent déjà l’influence de la politique étrangère américaine. Le fait que le gouvernement de Joe Biden envisage haut et fort de nouvelles restrictions commerciales à l’encontre de la Chine accentue les craintes déjà vives d’une nouvelle escalade du différend commercial. Les mesures entraînent des contre-mesures, qui en déclenchent d’autres à leur tour. Le secteur des semi-conducteurs, largement tributaire des importations, est particulièrement touché par chaque nouvelle vague de sanctions douanières, qui finit tôt ou tard par peser sur sa rentabilité. Fait révélateur: à la faveur de la vague de ventes actuelle, Intel investit non seulement dans tous les fabricants de puces qui détiennent leurs propres ateliers de production, mais aussi massivement dans de nouvelles usines aux États-Unis.

Mais parallèlement à la politique étrangère, la politique intérieure anticipée montre aussi des signes avant-coureurs. Les marchés s’attendent de plus en plus à voir les entreprises industrielles traditionnelles mais aussi les entreprises du secteur des services financiers sortir gagnantes de la politique intérieure que pourrait mener Donald Trump. Si J.D. Vance est nommé à la vice-présidence, il semble encore plus probable que ce mandat sera lui aussi marqué par la délibéralisation et par des baisses d’impôt. Avec une politique aussi favorable à l’économie, et dans la perspective d’un cycle de baisses des taux d’intérêt, attendu sous peu, les entreprises américaines plus petites et moins connues ont donc bon espoir de bénéficier d’un nouvel élan.

Alors, non, il n’est pas encore certain que Donald Trump devienne le nouveau président senior des États-Unis. Mais cette probabilité a encore augmenté depuis l’attentat. Et il est encore moins certain que le républicain soit vraiment devenu plus modéré et plus réfléchi. Même si c’était le cas, un second mandat laisserait malgré tout son empreinte sur la politique extérieure et intérieure, et sur les marchés financiers. D’ailleurs, Trump est déjà en train de chambouler le paysage avant même de prendre place dans le bureau ovale. Pardon: d’y reprendre place.

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