Transmettre sa maison à ses enfants

Souvent, avec l’âge, les besoins et les exigences en matière de logement évoluent. Peut-être voulez-vous en changer pour un plus petit et transmettre votre maison à vos enfants? Ou vous souhaitez continuer à y habiter, mais vous entendez déjà régler les questions de propriété et vous assurer que la maison familiale que vous aimez tant reste en la possession des vôtres? Dans tous les cas, il y a quelques points à prendre en considération si l’on souhaite transmettre sa maison à ses enfants.

Est-il judicieux de transmettre sa maison à ses enfants?

Attention en cas de prestations complémentaires

La décision de transmettre sa maison à ses enfants est une affaire complexe et dépend de plusieurs facteurs. Il convient d’examiner les possibilités de donation, d’avancement d’hoirie ou de vente et d’en connaître les conséquences financières, successorales et fiscales correspondantes, y compris en ce qui concerne les frais d’un séjour ultérieur en établissement médico-social (EMS) en cas de soins.

La préservation du patrimoine familial joue souvent un rôle, tout comme la crainte de devoir un jour vendre son bien immobilier pour pouvoir faire face aux coûts élevés d’un EMS. L’idée de léguer sa fortune, y compris son logement, à ses héritiers et d’acquitter ensuite les frais d’EMS en cas de soins via les prestations complémentaires (PC) peut sembler séduisante. D’autant plus que l’on lit souvent qu’en cas de transfert de propriété d’un logement, la donation est prescrite dans un délai de 10 ans.

Mais attention: lors de l’examen du droit aux PC, les autorités ajoutent le patrimoine cédé volontairement à titre gratuit, c’est-à-dire les donations ou les avancements d’hoirie, au patrimoine existant. En d’autres termes, la donation pourrait avoir un effet boomerang. D’une part, il existe le risque de perdre le droit aux PC et de devoir ainsi contacter le bureau d’aide sociale. D’autre part, les bénéficiaires pourraient dépasser le seuil de l’obligation d’assistance des proches et devoir, par conséquent, payer – du moins partiellement – les frais d’EMS de leurs parents. De plus, depuis 2021, les héritiers doivent, après le décès d’un bénéficiaire de PC, rembourser les prestations reçues au cours des dix dernières années et qui sont supérieures au montant exonéré de 40 000 francs.

Le prêt comme alternative

Une avance d’hoirie ou une donation peut créer des tensions si les autres héritiers se sentent lésés. Le prêt est une autre façon de soutenir vos descendants de votre vivant (sans compromettre la paix de la famille). Avantage notoire, le patrimoine reste ainsi en votre possession et vous pouvez, si besoin et selon les modalités contractuelles, demander le remboursement du prêt. En cas de succession, ce dernier tombe dans la masse successorale en tant que créance, de sorte qu’aucun descendant n’est privilégié. Mais la question de savoir ce que vous faites de votre bien immobilier demeure ouverte.

Transmettre un bien immobilier: quelles sont les options?

Léguer, donner, vendre?

Il existe plusieurs façons de transmettre un bien immobilier à la génération suivante: avance d’hoirie, donation (ou donation mixte) et vente.

Avance d’hoirie aux descendants

  • Dans le cas d’une avance d’hoirie, vous remettez la maison sans contrepartie financière ou à un prix inférieur à la valeur vénale. L’enfant bénéficiaire ne paie donc pas l’intégralité du prix de vente de la maison (voire aucun) et la différence par rapport à la valeur intrinsèque est considérée comme une avance d’hoirie. Il est recommandé de consigner l’accord par écrit, y compris le montant de l’avance d’hoirie, car ce montant sera alors imputé sur celui de la succession. Il y a donc une obligation de compensation vis-à-vis des autres héritiers, par exemple les frères et sœurs.
  • Vous pouvez exempter l’enfant bénéficiaire de cette obligation de compensation dans votre testament, mais uniquement dans la limite du quota libre. Les parts légales doivent être préservées. Cela vaut d’ailleurs également pour une plus-value temporaire qui doit normalement être compensée. Vous pourrez aussi éviter cela si vous le mentionnez dans votre testament.
  • En cas d’avance d’hoirie, aucun droit de mutation n’est dû et l’impôt sur les gains immobiliers peut être reporté. En outre, seule la différence entre la valeur vénale et la contrepartie est imposée en tant qu’avance d’hoirie – dont les descendants sont exonérés dans de nombreux cantons.

Donation / donation mixte à des descendants et autres personnes

  • Si le bénéficiaire n’est pas un héritier légal, on ne parle pas d’une avance d’hoirie, mais d’une donation. En tant que testateur, vous devez expressément déclarer qu’il s’agit d’une donation. Alors que l’on transmet à titre gratuit l’ensemble d’un bien immobilier avec une donation, on parle de «donation mixte» lorsqu’on le transmet à un prix inférieur à celui du marché.
  • En cas de donation (ou de donation mixte) à des descendants, il existe en principe une obligation de compensation. Pour les autres personnes en général aussi – mais après votre décès, le bénéficiaire doit «seulement» compenser les donations qui remontent à moins de cinq ans ou qui violent les parts réservataires.
  • Il en va de même pour l’avance d’hoirie d’un point de vue fiscal. Cela signifie que même en cas de donation, l’impôt sur les gains immobiliers peut être reporté et qu’aucun droit de mutation n’est généralement dû (différences cantonales). L’impôt sur les donations n’impose que la différence entre la valeur vénale et la contrepartie, c’est-à-dire le «prix d’achat» que paient les bénéficiaires. Le taux d’imposition dépend du montant de la donation et du degré de parenté et varie fortement selon les cantons (de 0% à plus de 40%).

Vente

  • Bien qu’une vente à vos descendants ne constitue pas un héritage, il s’agit d’une possibilité qui mérite d’être examinée. En effet, en atteignant le prix que vous auriez obtenu sur le marché libre, vous pouvez consolider votre situation financière et bien vous préparer pour l’avenir, par exemple pour un logement et un établissement de soins adapté à votre âge. Le «prix de vente» est un point fréquent de discussion.
  • Le «prix familial», c’est-à-dire le prix auquel vous remettez le bien immobilier à votre enfant, est souvent inférieur au prix actuel du marché. Cela étant, vous économisez les frais de commercialisation et, selon le canton, les droits de mutation. Il peut donc être intéressant financièrement pour vos enfants d’acheter la maison parentale.
  • Il n’en résulte aucune obligation en matière de droit successoral. En tant que vendeur, vous acquittez, comme d’habitude, un impôt sur les gains immobiliers et, dans certains cantons, également les droits de mutation. Dans le canton de Berne, par exemple, vous en êtes exempté parce que vous vendez à vos descendants.
 FinancièresDroit successoralFiscales
Avance d’hoirie– sans frais
– à un prix de marché réduit
Pour les descendants bénéficiaires:
– Obligation de compensation
– Les parts légales doivent être préservées
– Impôt sur les gains immobiliers reporté
– Pas de droits de mutation
– Impôt sur les donations (selon le canton et le degré de parenté)
Donation– sans frais
– à prix de marché réduit (donation mixte)
Pour les descendants bénéficiaires:
– Obligation de compensation
– Les parts légales doivent être préservées

Pour les autres personnes:
– Obligation de compensation limitée
– Les parts légales doivent être préservées
– Impôt sur les gains immobiliers reporté
– Pas d’impôts sur les mutations de propriétaire (selon le canton et le degré de parenté)
– Impôt sur les donations (selon le canton et le degré de parenté)
Vente à la valeur vénale– Vente au prix du marché– Aucune conséquence– Impôt sur les gains immobiliers
– Droits de mutation (selon le canton)

Les enfants doivent-ils reprendre le prêt hypothécaire des parents?

Si les enfants reprennent le logement en propriété et donc les aspects financiers du bien immobilier, la question se pose de savoir ce qu’il adviendra du prêt hypothécaire. Le reprendre ou le résilier?

Les conditions requises pour le transfert d’un prêt hypothécaire sont simples: la capacité financière doit être assurée. Cela signifie que l’établissement financier prêteur qui a mis à disposition le prêt hypothécaire pour le financement de l’immeuble doit approuver un transfert. Dans cette optique, il est examiné si les nouveaux propriétaires sont solvables et disposent des moyens financiers pour se permettre le bien immobilier. Toutefois, les prêts hypothécaires étant toujours liés à des personnes et à des immeubles, les conditions doivent de toute façon faire l’objet d’une nouvelle réglementation. En fonction de la situation du marché, il en résulte de nouvelles possibilités et une marge de manœuvre pour les conditions hypothécaires.

En revanche, si l’on ne souhaite pas reprendre le prêt hypothécaire et résilier le contrat existant, il faudra, dans certains cas, payer une «pénalité», c’est-à-dire un montant de sortie pour la résiliation anticipée. C’est ce qu’on appelle l’«indemnité de résiliation anticipée», laquelle est calculée sur la base de la durée restant à liquider et des intérêts potentiels liés au contrat de prêt hypothécaire. La résiliation anticipée est donc possible, mais peut entraîner des frais.

Droit d’habitation en cas de transmission de la maison

Vous souhaitez continuer à vivre aussi longtemps que possible dans votre maison, même après en avoir transmis la propriété? Vous disposez de deux options: droit d’habitation et usufruit. Ces «servitudes» vous permettent de transmettre votre maison à vos descendants et d’en disposer pratiquement sans changement.

Avec le droit d’habitation, vous pouvez vivre dans votre logement à vie et ne prenez en charge que les frais d’entretien ordinaires comme ceux d’électricité et de fonctionnement. Dans ce cas, la valeur locative est déclarée comme revenu.

L’usufruit vous permet d’habiter vous-même dans la maison ou de louer le bien immobilier et de percevoir le loyer. Vous déclarez la valeur locative ou le revenu locatif et payez l’impôt sur la fortune. En outre, vous réglez les intérêts hypothécaires et les primes d’assurance, les coûts d’entretien et de gestion du bien immobilier – exactement comme jusqu’à présent en tant que propriétaire.

Important: l’usufruit et le droit d’habitation s’appliquent, en principe, jusqu’au décès des parents; ils continuent donc à courir même s’ils déménagent en EMS. Le mieux est de régler contractuellement à l’avance la marche à suivre en pareil cas. Par exemple, les parents renoncent au droit d’habitation ou d’usufruit lorsqu’ils déménagent dans un EMS et perçoivent en contrepartie une rente à vie ou une indemnité unique. Enfin, l’usufruit et le droit d’habitation recèlent un certain potentiel de conflit. En effet, les parents n’ont plus le droit de transformer le bien immobilier selon leurs souhaits et ce sont désormais les enfants qui assument la responsabilité des travaux d’entretien plus importants. Cela signifie, par exemple, qu’ils décident d’installer ou non une nouvelle cuisine.

Comparaison de l’usufruit et du droit d’habitation

Droit d’habitationUsufruit
CréationRègle: acte authentique
Exception: forme écrite simple pour testament et pacte successoral
Règle: acte authentique
Exception: forme écrite simple pour testament et pacte successoral
DuréeLimitée ou à vie. Résiliation anticipée possible par renonciation unilatérale par le bénéficiaire du droit d’habitation.Limitée ou à vie. Résiliation anticipée possible par renonciation unilatérale par le bénéficiaire de l’usufruit.
DroitsLe bénéficiaire du droit d’habitation est autorisé à habiter lui-même le logement. Le droit est incessible et ne passe pas aux héritiers. Une mise en location n’est donc pas autorisée.Le bénéficiaire du droit d’usufruit est autorisé à habiter lui-même le logement ou à le mettre en loca-tion. Le revenu locatif revient au bénéficiaire de l’usufruit.
Entretien courant*À la charge du bénéficiaire du droit d’habitationÀ la charge du bénéficiaire du droit d’usufruit
Entretien extraordinaireÀ la charge du propriétaireÀ la charge du propriétaire
Taux hypothécaires*À la charge du propriétaireÀ la charge du bénéficiaire du droit d’usufruit
Primes d’assurance*À la charge du propriétaireÀ la charge du bénéficiaire du droit d’usufruit
Taxes*À la charge du propriétaireÀ la charge du bénéficiaire du droit d’usufruit
Impôt sur le revenuLa valeur locative est déclarée par le bénéficiaire du droit d’habitation.
Les frais d’entretien, intérêts hypothécaires et primes d’assurance peuvent être déduits par le propriétaire.
La valeur locative est déclarée par le bénéficiaire du droit d’usufruit.
Il peut déduire les frais d’entretien, intérêts hypothécaires et primes d’assurance.
Impôt sur la fortuneLa fortune est déclarée par le propriétaire. Il peut déduire les prêts hypothécaires.La fortune est déclarée par le béné-ficiaire de l’usufruit. Il peut déduire les prêts hypothécaires.

*Une réglementation différente est possible.

Comment transmettre ma maison à mes enfants?

1. Évaluation de la maison: nous recommandons de demander une estimation professionnelle de la valeur vénale du bien immobilier et de créer des conditions claires le plus tôt possible, même en cas de succession ultérieure.

2. Décision sur la forme de transmission: pesez les avantages et les inconvénients des formes de transmission possibles (donation, donation mixte, avance d’hoirie et vente) et parlez-en avec vos enfants.

3. Réglementation relative au droit d’habitation ou à l’usufruit: demandez-vous si vous envisagez un droit d’habitation ou un usufruit et convenez des règles en cas de déménagement en EMS.

4. Conseil financier et juridique: un conseil fiscal peut vous aider à comprendre les conséquences fiscales, tandis qu’un avocat vous expliquera concrètement le cadre légal (notamment en ce qui concerne l’héritage et l’obligation de compensation).

5. Préparation des documents: rassemblez tous les documents nécessaires. Notamment:

  • Certificats de propriété et extraits actuels du registre foncier
  • Contrats de prêt hypothécaire et de crédit
  • Contrats de donation ou d’achat (et convention de droit d’habitation ou d’usufruit)

6. Rendez-vous chez le notarie: un rendez-vous chez le notaire est indispensable, car ce dernier inscrit le transfert de propriété au registre foncier. C’est à ce stade que les contrats sont signés et que le transfert formel de la propriété est effectué.

7. Inscription au registre foncier: après le rendez-vous chez le notaire, les nouveaux propriétaires seront inscrits au registre foncier. Il s’agit de la dernière étape juridique pour terminer la transmission.

8. Gestion financière: si vous avez vendu votre maison, la procédure financière a maintenant lieu. Les enfants paient le prix d’achat, les éventuels prêts hypothécaires sont transférés ou recontractés.

9. Déménagement et remise: si ni droit d’habitation ni usufruit n’ont été convenus, le déménagement peut maintenant être planifié et réalisé à l’issue de toutes les étapes formelles et de la remise des documents pertinents.

10. Annonce auprès de l’office des habitants: enfin, les nouveaux propriétaires doivent annoncer le changement de domicile aux autorités. Cela comprend notamment l’annonce à l’administration des habitants et des impôts.

Combien cela coûte-t-il de transmettre sa maison à ses enfants?

Le coût de transmission d’une maison à ses enfants en Suisse peut varier et dépend de plusieurs facteurs. Voici les principaux éléments de coût à prendre en compte:

Frais de notaire: l’authentification de la transmission par le notaire est obligatoire. Les frais peuvent varier selon le canton et la valeur de la maison, mais ils sont souvent compris entre 0,1 et 1% de la valeur du bien.

Frais de registre foncier: l’inscription des nouveaux propriétaires au registre foncier est également soumise à des frais basés sur la valeur du bien immobilier. Ceux-ci peuvent également être compris entre 0,1 et 1% de cette dernière.

Coût d’évaluation: une évaluation professionnelle de la maison peut être nécessaire pour déterminer la valeur actuelle du marché. Les coûts peuvent varier de 500 à 1500 francs.

Impôts: l’impôt sur les donations varie selon le canton et le montant de la donation. Dans de nombreux cantons, les donations à des descendants directs (enfants) sont toutefois exonérées d’impôt ou sont soumises à un taux d’imposition réduit. L’impôt sur les gains immobiliers n’est dû que lors de la vente d’une maison, lorsqu’un gain est réalisé, et peut également être reporté en cas de changement de propriété par voie d’une succession, d’une donation ou d’une avance d’hoirie. Les coûts des droits de mutation varient fortement d’un canton à l’autre, allant de l’exonération de l’imposition à des montants relativement élevés.

Coûts du conseil juridique et fiscal: le recours à un conseiller fiscal ou à un avocat pour clarifier les aspects fiscaux et juridiques peut entraîner des coûts supplémentaires, qui dépendent de la complexité de l’affaire et de l’étendue de la consultation.

Frais hypothécaires et coûts du crédit: si la maison est encore grevée, des frais peuvent être occasionnés par l’adaptation ou le transfert des prêts hypothécaires et des crédits. En outre, en cas de résiliation anticipée du prêt hypothécaire, une indemnité de résiliation anticipée peut être exigée.

Autres frais: d’autres frais plus modestes peuvent s’appliquer, par exemple pour l’obtention de documents ou l’annonce d’un changement de propriétaire aux autorités.

Y a-t-il un délai de 10 ans en Suisse?

En Suisse, il n’existe aucun délai de prescription pour une renonciation à un patrimoine. À titre d’exemple, si l’on transmet sa maison à ses enfants, cela sera toujours considéré comme une renonciation au patrimoine au bout de 10 ans.

Transmettre suffisamment tôt sa maison à ses enfants est néanmoins avantageux car la valeur de la donation diminue chaque année d’un montant exonéré de 10 000 francs. En outre, la renonciation au patrimoine s’applique à la valeur de marché au moment de la donation. Les augmentations de valeur ultérieures profiteront au nouveau propriétaire.

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